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Probing the elemental composition of gas giant exoplanets in the context of their formation and evolution



Relier la composition atmosphérique des planètes géantes aux conditions de formation dans le disque protoplanétaire est un objectif de longue date de la communauté scientifique planétaire. C’est d’ailleurs un des facteurs qui a motivé l’envoi de satellites spatiaux vers les planètes géantes du système solaire, pour tenter de déterminer leur composition atmosphérique. Mais si je vous disais que certaines choses sont plus faciles à mesurer sur des exoplanètes situées à des centaines d’années-lumière de nous que sur Jupiter ou Saturne dans notre propre arrière-cour cosmique, me croiriez-vous ? Dans cette thèse, nous utilisons la spectroscopie à haute résolution avec différents instruments pour caractériser les atmosphères des exoplanètes géantes chaudes et en tirer toute information possible sur ce que leur composition présente implique vis-à-vis de leur historique de formation et d’évolution.


Dans une première étude, nous avons utilisé le spectrographe à haute résolution dans le proche infrarouge SPIRou pour observer l’émission thermique de la Jupiter chaude non transitante τ Boo b. Nos résultats ont révélé la présence d’une forte absorption de CO, mais une absence nette de signal du H2O. Grâce à un nouveau cadre d’analyse, nous avons pu déduire de manière robuste la forme de la structure verticale de température du côté jour de τ Boo b et contraindre les abondances de toutes les principales molécules contenant de l’oxygène et du carbone dans son atmosphère. Ceci nous a permis de dériver une abondance de C/H en phase gazeuse qui est élevée par rapport à celle du Soleil, comparable au niveau d’enrichissement de Jupiter. Nous avons également exploré l’hypothèse que la composition atmosphérique de τ Boo b pourrait être le résultat de son historique de formation, si elle s’est formée près de la ligne de glace du CO en accrétant du gaz enrichi.


Dans un second projet, nous avons utilisé le spectrographe optique haute résolution MAROON-X pour observer l’exoplanète géante ultra-chaude WASP-76b alors qu’elle passait devant son étoile hôte. Ces données nous ont permis de détecter 16 espèces dans son atmosphère, y compris une première détection sans ambiguïté de la molécule d’oxyde de vanadium, considérée comme un moteur des inversions thermiques. En mesurant l’abondance relative des espèces observées, nous avons pu découvrir une transition abrupte dans la température de condensation : où les éléments étaient soit dans des proportions proches de celles du soleil par rapport au fer, soit appauvris par des ordres de grandeur s’ils avaient des températures de condensation supérieures à 1550K. Nos résultats ont également montré que presque toutes les espèces détectées ont des signaux d’absorption asymétriques, indiquant que WASP-76b a probablement un hémisphère plus froid ou plus nuageux que l’autre.


Enfin, dans une troisième étude, nous avons observé l’émission thermique du côté jour de la Jupiter ultra-chaude WASP-121b en utilisant les spectrographes à haute résolution CRIRES+ et ESPRESSO. Avec cet ensemble de données combinées couvrant les longueurs d’onde optiques et proche infrarouge, nous avons pu détecter des signaux d’émission de CO, H2O, et Fe, indiquant que l’atmosphère de WASP-121b a une inversion thermique. Grâce à une analyse de récupération, nous avons ensuite mesuré simultanément et avec précision les abondances de C, O et Fe, constatant que les éléments C et O, plus volatils, sont plus abondants que le Fe réfractaire. De cette composition atmosphérique déduite, nous avons pu conclure que WASP-121b a probablement accrété son enveloppe à une séparation orbitale beaucoup plus grande que sa position actuelle, à partir d’un matériau riche en glace.


Avec ces travaux, nous avons démontré la puissance des instruments et des techniques disponibles aujourd’hui pour extraire beaucoup d’informations sur les atmosphères des Jupiters chaudes et ultra-chaudes. En particulier, la capacité de mesurer leur composition avec une grande précision nous a permis d’explorer des liens potentiels avec la formation, ce qui peut nous donner un aperçu des mécanismes physiques qui permettent la formation des planètes géantes. Cependant, il reste encore beaucoup à faire et nous espérons continuer à repousser les limites de ce que nous pouvons réaliser avec la spectroscopie à haute résolution, ainsi qu’à exploiter les synergies avec les observations complémentaires qui peuvent être obtenues avec des télescopes spatiaux tels que le JWST.

Soutenance de doctorat de Stefan Pelletier